Le 19 juin dernier, l’Observatoire du décolonialisme et des idéologies identitaires a rendu public un rapport corrosif concernant les manifestations idéologiques à l’université et dans la recherche. Nommé dans les médias rapport sur l’islamo-gauchisme à l’université, il se substitue à celui que le CNRS a refusé de faire. A la lecture des seules conclusions, on peut comprendre pourquoi ! Au travers d’une revue des thèses en sciences sociales et humaines, des publications et programmes de recherche, des axes des enseignements et des séminaires, et des preuves de « cancel culture », le rapport de L’Observatoire est sans ambiguïté : l’université publique française est sous la coupe du racialisme, du féminisme radical, de l’intersectionnalité, du décolonialisme, et plus largement de l’islamo-gauchisme.
L’université gangrénée par l’idéologie
En février dernier, Olivier Vial, directeur du CERU (Centre d’Etudes et de Recherches Universitaire), émettait des doutes quant à la viabilité et l’impartialité d’une étude rédigée par le CNRS. Pour lui, « la confier au CNRS et aux membres de l’alliance Athéna qui n’ont jamais fait preuve de grande lucidité en la matière » aurait été le meilleur moyen d’enterrer le sujet. C’est donc l’Observatoire du décolonialisme qui s’est chargé du rapport, sous le feu des critiques de la gauche et de l’extrême-gauche.
Entrons dans le cœur de ce rapport. Il s’attarde, en une vingtaine de pages, sur les thèses en sciences humaines et sociales, passées et actuelles. Il est question de « déconstruire la race chez les diplômé.e.s » en doctorat de sociologie, de l’écoféminisme autochtone par la « cosmologie animaliste décoloniale » en philosophie, des artistes femmes et « queer » en anthropologie sociale, de la « menace du stéréotype comme cause des comportements agressifs » en psychologie. On trouve aussi des thèses sur la plaisir féminin dans la pornographie, le choix du prénom chez les transsexuels, ou encore la « performativité du langage ordinaire dans la construction du genre et des luttes féministes ». On pourrait penser que ces thèses émanent toutes d’une même université. En réalité, elles relèvent d’une idéologie qui touche de nombreux établissements sur tout le territoire (Amiens, Paris, Bordeaux, Grenoble, etc.).
Dans les séminaires et les conférences proposés sur les campus de France, l’idéologie gauchiste est au cœur des programmes. Le Gram (Groupe de recherche sur l’analyse du discours des médias) a par exemple tenu une conférence intitulée « Déconstruire le genre ». A Lyon 3, on s’interroge sur la cartographie des sexualités et la sexualisation des espaces. A Sorbonne Nouvelle, on se demande si la linguistique est une discipline de combat. Le rapport fait également le tour des revues universitaires et de leurs études. L’une d’elle affirme clairement que l’école et l’université discriminent racialement les élèves, et que le racisme y est structurel. Une autre explique que c’est la faute de la France et des Français si les descendants d’immigrés maghrébins ne s’assimilent pas dans notre pays.
Les exemples de fiches de postes sont là aussi éclairants. Un maître de conférence en études anglophones à l’Institut national universitaire d’Albi doit par exemple maitriser « les questions de genre, de race et d’intersectionnalité ». Un autre, pour postuler à Paris 8, devra se plier aux directives qui précisent qu’en science de l’éducation, il est nécessaire de développer « les approches dites décoloniales et intersectionnelles en sciences sociales ». Dans le même domaine d’étude, à Paris 10, le candidat doit avoir une expérience des « pédagogies qui invitent explicitement à lutter contre la reproduction des inégalités sociales et les discriminations en favorisant la justice globale – sociale et environnementale ». Les futurs instituteurs et professeurs de vos enfants ou petits-enfants, eux aussi, seront bien formés à l’idéologie – probablement mieux qu’à la pédagogie qui permettrait à leur élèves de savoir lire et compter convenablement. Enfin, pour être professeur de philosophie contemporaine à Toulouse 2, il est nécessaire de travailler sur les « études de genre et du féminisme, la théorie de la race, l’écologie politique, les études postcoloniales et décoloniales ».
On pourrait au moins espérer que l’idéologie identitaire touche uniquement les sciences sociales, mais non. Elle impacte également les sciences dures. Comme le nazisme remettait en cause la « science juive », ou le communisme la « science bourgeoise », les décoloniaux appellent désormais à remettre en question les acquis de la « science de l’homme blanc ». Ils souhaitent « décoloniser » la science. Ils sont encore ultra-minoritaires, et principalement aux Etats-Unis, mais leurs idées gagnent du terrain. Le rapport s’inquiète de leur probable diffusion sur notre territoire. De la pure folie digne d’une idéologie totalitaire.
Cette idéologisation de l’enseignement provoque une dégradation de sa qualité. Certains professeurs ne cherchent plus à éclairer et instruire, mais à imposer leurs idées en les présentant comme une vérité indiscutable.
Pression idéologique et négationnisme
L’idéologie imprègne donc de plus en plus les travaux universitaires. Certains professeurs et étudiants tentent de résister, mais ils en sont empêchés, non pas forcément par l’université ou le corps professoral, mais par les associations et « syndicats » de l’extrême-gauche étudiante.
Le rapport évoque les nombreuses campagnes de diffamation, de pressions, de plaintes en justice, de dénonciations publiques et autres actes d’intimidation visant ceux qui refusent de se soumettre à la doxa dominante. L’exemple le plus marquant est celui de l’IEP de Grenoble, où tous sont tétanisés au point de ne plus oser exprimer la moindre opinion « non-conforme ».
Dans ce contexte, la cancel culture est l’arme privilégiée des idéologues gauchistes. Voici une petite recension des actes évoqués dans le rapport :
l’attaque subie par des comédiens à la Sorbonne, auxquels ont a interdit de jouer une pièce d’Eschyle, Les Suppliantes, au motif que certains auraient porté des masques noirs ;
l’annulation d’un séminaire de formation dirigé par Mohamed Sifaoui sur le thème : « Comment les Frères musulmans veulent infiltrer la France”, afin de ne pas stigmatiser les musulmans ;
une forte recommandation de l’usage de l’écriture dite « inclusive » dans certaines facultés ;
des pressions pour annuler des enseignements de tronc commun et des séminaires à l’EHESS (Ecole des hautes études en sciences sociales) ;
la contestation du recrutement d’une enseignante à La Réunion au motif qu’elle est blanche.
Le rapport se conclut par ce paragraphe : « Un jeune étudiant qui entre aujourd’hui à l’Université peut se retrouver pris dans un bain idéologique particulièrement contraignant : à travers les cours qu’il reçoit, le militantisme de certains étudiants, l’orientation politique de certains syndicats étudiants et, dans son environnement immédiat, les nombreuses associations (féministes, LGBTQI+, antiracistes, antipolice, etc.), qui constituent une somme de pressions idéologiques sur des esprits encore fragiles. Ces pressions, qui continuent hors du temps de cours (à travers par exemple des conférences organisées sur le site) poussent certains jeunes à décrocher malgré leur motivation initiale. »
Le CNRS, lui, nie tout simplement l’existence de l’islamo-gauchisme, qui ne serait « pas une réalité scientifique ». Les nombreux médias subventionnés de gauche comme Libération et l’Humanité, les professeurs d’universités militants et autres sociologues, se sont offusqués de l’emploi de ce terme. Ils réfutent son existence, tout comme bon nombre de leurs prédécesseurs, dans les années 60 à 80, refusaient et réfutaient les critiques envers l’Union soviétique, la Chine maoïste, ou le régime des khmers rouges. Thierry Wolton explique cela dans son ouvrage Le négationnisme de gauche. Le gauchisme a aujourd’hui muté. Si le CNRS se bat sur le terrain de la sémantique, c’est pour mieux cacher le fait que les idéologies aujourd’hui à l’extrême-gauche dominent et contrôlent l’université.
L’islamo-gauchisme est en train de détruire l’esprit originel de l’université. Elle doit se libérer de cette emprise, comme de celle de l’Etat, et se transformer. La liberté et l’autonomie des universités et la concurrence entre elles, alliées à la pénalisation des atteintes à la liberté d’expression, seraient les outils le plus aptes pour lutter contre l’autoritarisme du gauchisme universitaire.