Vendue aux enchères en mai dernier, la poterie, trésor national chypriote, aurait dû rester au 10 Downing Street, comme le révèle le « Guardian ».
« The Lady’s not for turning. » Ce 10 octobre 1980, Margaret Thatcher, inflexible, annonce au Parlement et au monde qu’elle sera prête à tout pour défendre sa ligne, car elle sait ce qu’elle veut. De manière plus triviale, il semble aujourd’hui que la Dame de fer ait été aussi obstinément conservatrice vis-à-vis de certains objets précieux qu’en ce qui concerne sa ligne politique.
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Comme le rapportent nos confrères britanniques du Guardian, Margaret Thatcher est aujourd’hui au cœur d’un léger incident diplomatique entre le Royaume-Uni et le gouvernement chypriote. En 1988, celle qui est alors Première ministre reçoit de la part du président chypriote de l’époque, George Vassiliou, un vase antique vieux de 2 700 ans. Si les Chypriotes ont depuis toujours pensé que la poterie décorait fièrement l’intérieur du 10 Downing Street, sa présence récente au sein d’une vente aux enchères pose de sérieuses interrogations.
Le Royaume-Uni officiellement interrogé
Les autorités de l’île réclament donc des réponses. « Nous cherchons une explication sur la façon dont le protocole a pu dériver de la sorte », a déclaré au Guardian une source gouvernementale. Le ministre chypriote des Affaires étrangères, Nikos Christodoulides, a chargé le haut commissaire de Chypre au Royaume-Uni de se charger du dossier. D’autant que le cadeau était à l’époque purement diplomatique et n’avait donc rien à faire au domicile de Margaret Thatcher après la fin de son mandat.
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Décrit par la maison de vente Christie’s comme « appartenant à un propriétaire privé », le vase a rapporté 6 000 livres en mai dernier. Il faisait partie d’une vente d’environ 200 objets ayant appartenu à Margaret Thatcher et a été repéré par une historienne spécialiste de la poterie chypriote. Le président Vassiliou tenait, en offrant cette poterie précieuse, à remercier son homologue pour son investissement en faveur de la réunification de l’île, divisée entre la partie grecque et la partie turque. Le département chypriote des antiquités avait dû donner son accord avant que ce trésor national puisse quitter l’île.
Les ministres britanniques peuvent-ils conserver les cadeaux officiels ?
La question se pose désormais d’une éventuelle annulation de la vente. « J’imagine que les descendants ont vendu ce qui lui appartenait après sa mort et que le vase en faisait partie », explique au Cyprus Mail Androulla Vassiliou, femme de l’ancien président et ancienne membre de la Commission européenne. Selon le règlement britannique, les membres du gouvernement, Premier ministre inclus, peuvent conserver les cadeaux si leur valeur n’excède pas 140 livres ou s’ils décident de les acheter et de payer les taxes nécessaires sur ces objets. Sinon, ils sont la propriété du gouvernement. Depuis sa disparition en 2013, plusieurs ventes aux enchères ont été organisées autour des biens de Maggie Thatcher, permettant de récolter plus de 4,5 millions de livres, plus de 5 millions d’euros.